mercredi 17 avril 2019

Chronique : l'éponyme de Chimaira

Il y a un an, je vous parlais de la volonté du groupe Chimaira de s'imposer comme pilier du metal moderne américain avec The Impossibility of Reason. Cet album avait déjà l'intention de faire sortir le groupe de l'étiquette nu metal en avançant un style plus direct et viscéral. En 2005, la chimère enfonce le clou avec un album éponyme. Roadrunner Records étant connus pour imposer à leurs groupes de faire des albums à fort potentiel commercial, Chimaira s'est assuré auprès du label de ne faire aucun compromis et de privilégier un style propre, brutal et épique. L'essai est-il transformé ?


        A priori, l'album s'inscrit dans les mêmes conditions que l'album précédent puisque toujours produit par Ben Schigel et Mark Hunter dans les Spider Studios de Cleveland. En revanche, certains paramètres divergent comme l'introduction de Kevin Talley derrière les fûts, à l'époque ancien batteur pour diverses formations de death metal comme Misery Index ou Dying Fetus. Le choix n'est même certainement pas anodin quand on constate que Chimaira poursuit effectivement sa progression vers un style encore plus brutal. Tout ce qui permettait d'assigner à Chimaira l'étiquette "nu metal" est ainsi complètement évacué dans cet album : nous avons affaire à un groove/thrash metal influencé largement influencé par des groupes comme Metallica ou Pantera. J'en veux pour preuve les riffs pleins de groove et de lourdeur qui alimentent l'album. Les soli sont également omniprésents puisqu'il n'y a pas un seul morceau qui n'en ait pas. Côté rythmique, la dynamique fait la part belle aux tempos modérés, avec quelques accélérations bien senties comptant quelques blasts beats (Nothing Remains, Comatose, Pray for All). Nous pouvons faire une mention spéciale à Everything You Love pour ces roulements de grosse caisse hallucinants sur un tempo lent. Le chant a également quelque peu évolué : si Mark Hunter montre qu'il est de plus en plus aguerri avec son chant hurlé, il a considérablement réduit son chant clair qui se trouve souvent relégué derrière les hurlements (Nothing Remains, Salvation, Left for Dead, Lazarus). Les samples, quant à eux, sont toujours aussi discrets mais contribuent à créer une atmosphère assez malsaine et pesante, notamment grâce à ces bruitages tout droit sortis de films d'horreur (Nothing Remains, Save Ourselves, Inside the Horror, Lazarus). De manière générale, le sens de la composition des musiciens de Cleveland s'est affiné grâce à des morceaux plus longs et passants par de nombreux changements de dynamique et de tempo.
        Si le style musical s'assombrit, cela s'applique également aux thèmes qui traversent Chimaira. Les thèmes de la dépression et du suicide présents dans le premier album réapparaissent dans l'éponyme, mais sont traités de manière assez différente. Le côté morbide est à nouveau exploité sur des morceaux comme Nothing Remains ou Inside the Horror, mais le style plus incisif et le choix des samples pour agrémenter le morceau rende le traitement plus viscéral. On ajoute à cela un aspect épique, exploité dans le pont de Nothing Remains et surtout dans Salvation, donnant un côté extrêmement grave et solennel aux morceaux. Le final Lazarus, écrit en hommage à un ami défunt de Mark Hunter, combine l'ensemble de ces aspects qui en font un morceau de clôture extrêmement fort. De Comatose à Bloodlust, les chansons sont plus orientées vers les thèmes des représailles et les textes font même preuve d'un certain sadisme. Le propos devient plus proche du fond de The Impossibility of Reason, mais l'atmosphère malsaine de l'album le rend d'autant plus fort. Beaucoup de ces morceaux jouent sur la lenteur du tempo et le chant hurlé de Mark Hunter, ce qui créé un effet de lourdeur considérable et bienvenu.

        Ironiquement, Chimaira aura souffert d'un manque de soutien et de communication de la part du label Roadrunner Records, ce qui est dommage pour un album plus sombre, plus brutal et plus finement composé. Cela annonce la couleur pour la suite puisque Chimaira quittera le label et tentera de se refaire avec un album deux ans plus tard. A suivre...

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